Madrigal
“Le madrigal est d’ordinaire une espèce d’épigramme, composée de vers inégaux pour la mesure et irréguliers pour la rime”.
La définition que propose Charles Cotin dans ses Œuvres galantes en prose et en vers, l’année même de la parution des Nouvelles Nouvelles, met en évidence les deux critères principaux qui caractérisent le genre « selon l’usage du beau monde » (Cotin, p. 470) – en d’autres termes, conformément à la pratique qui prévaut en France dans la seconde moitié du XVIIe siècle.
« Vers inégaux pour la mesure et irréguliers pour la rime »
Le
madrigal est un poème hétérométrique et non strophique (“ses vers sont
inégaux et en quelque façon irréguliers”, Cotin, p. 460). Non seulement
il n’est soumis à aucune contrainte sur le plan de la longueur des vers
(presque toutes les possibilités entre quatre et douze syllabes sont
exploitées), mais surtout la relation entre le choix des divers types de
vers et la disposition des rimes n’obéit à aucun système.
De ce
point de vue, le madrigal constitue l’application la plus radicale de la
versification irrégulière que prise la poésie mondaine. Les exigences de
l’improvisation, à laquelle le madrigal est attaché par essence, ainsi
que la nécessité de donner l’impression de l’aisance, gage de naturel,
imposent une élaboration facile, peu contraignante (“La contrainte des
rimes est plutôt une chaîne ou des entraves qui empêche la poésie de
marcher qu’un secours et une assistance”, Cotin, p. 462).
« une espèce d’épigramme »
De même qu’une épigramme, un madrigal
est un poème de dimension réduite (entre quatre et une vingtaine de
vers), organisé en fonction d’un trait d’esprit qui se révèle pleinement
dans la pointe par laquelle se clôt le poème. L’humour, dans sa
dimension de partage collectif, est une composante indissociable de
l’effet que doit produire la lecture à haute voix de
l’oeuvre.
En mettant l’accent sur l’humour et sur la spontanéité, en dédaignant les contraintes de la rime, en cultivant la recherche de l’effet, en privilégiant en outre les sujets amoureux (“la galanterie est son principal emploi”, selon Cotin, p. 471), le madrigal s’affirme comme la création poétique par excellence de la culture mondaine
Le genre jouit d’une très grande vogue au moment où sont rédigées et publiées Les Nouvelles Nouvelles : les innombrables créations, proposées à l’oral en prétextant de la spontanéité, circulant ensuite sous forme de billets manuscrits, sont partiellement reprises dans les recueils imprimés de diversités, ou insérées au sein des fictions narratives mondaines.
C’est suivant ce modèle que Donneau de Visé accorde une place, dans sa nouvelle des « Nouvellistes », au « madrigal pour Julie » et au « madrigal de la tristesse ».